Lorsqu’un cheval devient brutalement difficile dans le travail, qu’il montre des signes d’inconfort sans explication claire, ou qu’il refuse soudainement le contact avec la main, il est tentant de penser à un problème de dos, de dents ou de selle. Pourtant, une autre pathologie, bien plus discrète mais tout aussi invalidante, peut être en cause : la neuropathie du nerf trijumeau, souvent appelée maladie du trijumeau.

Qu’est-ce que le nerf trijumeau ?

Le nerf trijumeau est l’un des nerfs crâniens les plus importants chez le cheval (comme chez l’humain). Il est responsable de la sensibilité de toute la face, y compris les yeux, les naseaux, les lèvres, la mâchoire, les dents, et une partie des muscles masticateurs. Il est composé de trois branches principales, d’où son nom.

Lorsqu’il fonctionne normalement, ce nerf permet au cheval de percevoir les sensations (toucher, douleur, pression) sur toute la tête. Mais quand il est endommagé ou irrité, cela peut entraîner une douleur neuropathique chronique, comparable à des décharges électriques, des sensations de brûlure ou d’engourdissement.

La maladie du trijumeau : une douleur invisible

La neuropathie du trijumeau est une affection dans laquelle ce nerf devient hypersensible. Cela signifie que le cheval ressent une douleur persistante au niveau de la tête, sans cause externe visible. Cette douleur peut être unilatérale ou bilatérale, et les signes peuvent être subtils au début, puis s’aggraver.

Les symptômes les plus courants :

  • Refus de se laisser toucher la tête ou le chanfrein

  • Frottements excessifs du nez sur les membres ou les murs

  • Secousses de tête inexpliquées (headshaking)

  • Réactions violentes au contact du filet ou de la muserolle

  • Clignements d’yeux anormaux, larmoiement, ou contraction du muscle orbiculaire

  • Difficultés à s’alimenter ou mastication asymétrique

  • Perte de performance ou comportement agressif au travail

Une maladie difficile à diagnostiquer

L’un des grands défis avec la maladie du trijumeau est qu’elle n’est pas visible à l’œil nu. Les examens classiques (radiographies, dentisterie, scanner, IRM) peuvent revenir normaux. C’est un diagnostic d’exclusion, souvent long à établir, après avoir éliminé toutes les autres causes possibles d’inconfort.

Des tests de sensibilité au niveau de la face ou des tests à la lidocaïne (anesthésiant local) peuvent parfois aider à confirmer la suspicion.

Quelles causes possibles ?

Les origines exactes de la maladie du trijumeau restent mal connues, mais plusieurs pistes sont envisagées :

  • Traumatisme crânien

  • Infection virale ou bactérienne passée

  • Compression nerveuse ou inflammation chronique

  • Facteurs génétiques ou auto-immuns

  • Exposition excessive au soleil ou à des allergènes

Chez certains chevaux, la cause ne sera jamais clairement identifiée.

Quel traitement ?

Malheureusement, il n’existe pas de traitement curatif universel. Le but est de soulager le cheval et de gérer la douleur. Voici les options les plus fréquemment utilisées :

  • Médicaments anti-épileptiques comme la gabapentine

  • Compléments alimentaires pour soutenir le système nerveux

  • Masques anti-lumière UV, si les symptômes sont aggravés par le soleil

  • Modifications de l’équipement (filet, muserolle, embouchure)

  • Soins complémentaires : ostéopathie, acupuncture, laser thérapeutique

Dans certains cas, les chevaux peuvent reprendre une activité normale. Pour d’autres, un arrêt de travail, un changement de rythme de vie, voire une réforme, peut être nécessaire.

Ce qu’il faut retenir

La maladie du trijumeau reste une pathologie méconnue et sous-diagnostiquée. Elle nécessite une grande attention aux comportements du cheval et une écoute attentive de son inconfort. Si votre cheval montre des signes inhabituels au niveau de la tête ou du comportement au travail, ne négligez pas cette piste.

Comme toujours, une approche pluridisciplinaire (vétérinaire, dentiste équin, ostéopathe) et une bonne communication entre professionnels sont les clés pour offrir à votre cheval un diagnostic juste et un confort de vie optimal.